Hermann Göring
(1897-1973)


Une jeunesse militaire et aventureuse
Hermann Wilhelm Göring naît le 12 janvier 1893 à Rosenheim, en Bavière, dans une famille aisée. Son père, ancien gouverneur d’une colonie allemande en Afrique, lui transmet un goût de l’autorité et du prestige. Sa jeunesse se déroule entre confort bourgeois et éducation militaire. Élève énergique, parfois turbulent, il se destine très tôt à la carrière des armes.
Quand éclate la Première Guerre mondiale, Göring s’engage comme officier d’infanterie avant de rejoindre l’aviation naissante. Il devient un as de l’aviation allemande, décoré, audacieux, reconnu pour sa témérité. Il succède même, brièvement, au célèbre Manfred von Richthofen, le « Baron Rouge », à la tête de son escadrille. Cette expérience marquera à jamais son imaginaire : il restera toute sa vie fasciné par les uniformes, les médailles, les avions et la mise en scène martiale.
L’un des premiers compagnons de Hitler
Après la guerre, Göring erre un temps dans une Allemagne en crise. Il s’installe en Suède, épouse Carin von Kantzow, une noble suédoise dont il restera longtemps éperdument amoureux. De retour en Allemagne, il assiste à un meeting d’Adolf Hitler à Munich, en 1922. Séduit par l’orateur, Göring rejoint rapidement les rangs du NSDAP. Il en devient une figure majeure grâce à son aura militaire.
Il joue un rôle de premier plan lors du Putsch de la brasserie en 1923, où il est blessé. Contraint à l’exil après l’échec du coup d’État, il sombre dans la morphinomanie pour calmer ses douleurs. Cette addiction marquera son comportement jusqu’à la fin de sa vie.
Malgré cela, il reste un fidèle d’Hitler. Lors de la montée du parti nazi, il s’impose comme l’un des visages publics les plus populaires et les plus « rassurants » du mouvement, en contraste avec les figures plus sombres du nazisme. Grand, théâtral, souriant, il cultive une image de bon vivant patriote. Cela lui vaut le respect d’une partie des élites traditionnelles.
Pilier du pouvoir nazi
Lorsque Hitler arrive au pouvoir en 1933, Göring va immédiatement occuper des postes clés. Ministre de l’Intérieur de Prusse, il va créer la Gestapo, qu’il confiera plus tard à Himmler. Il est aussi président du Reichstag, puis ministre sans portefeuille. Surtout, il devient le chef de l’aviation. En effet, il fonde et dirige la Luftwaffe, qu’il transforme en un instrument redoutable de guerre et de propagande.

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Hermann Göring devient progressivement l’homme le plus puissant du Reich après Hitler. Ainsi, il est nommé Plénipotentiaire du Plan de Quatre Ans en 1936, chargé de la mobilisation de l’économie allemande vers la guerre. Dès lors, il s’enrichit massivement, multiplie les propriétés, les uniformes extravagants, et accumule les décorations.
Il est aussi le grand collectionneur d’art du régime. En effet, il pille systématiquement les musées, les galeries et les collections privées, notamment juives, à travers l’Europe. Sa résidence de Carinhall, au nord de Berlin, devient un musée personnel où il entrepose des milliers d’œuvres volées : tableaux de maîtres anciens, sculptures, meubles rares. Il se voit comme un mécène d’un nouvel empire esthétique, à l’image de l’homme antique.
Le visage populaire du nazisme
Jusqu’au début de la guerre, Göring est la figure la plus aimée du peuple allemand après Hitler. Son goût pour le faste, son humour bonhomme, son apparente générosité tranchent avec la froideur de Himmler ou le fanatisme de Goebbels. Il donne des interviews à la presse étrangère, se montre lors de grandes parades, et incarne aux yeux de beaucoup une forme de nazisme « national-conservateur », patriote mais moins sinistre. Cette perception sera largement erronée, tant sa complicité avec le système répressif est totale.

Göring est aussi l’auteur de décisions criminelles majeures. Ainsi, il signe l’ordre du 31 juillet 1941, par lequel il charge Heydrich de préparer « la solution finale de la question juive ». Il participe donc pleinement, même à distance, à la mise en place de la Shoah.
Commandant de la Luftwaffe et stratège incompétent
Pendant la Seconde Guerre mondiale, Göring conserve un immense pouvoir en tant que chef suprême de la Luftwaffe. Il est le principal artisan de la stratégie aérienne allemande, notamment lors de la campagne de Pologne, de France, puis de la Bataille d’Angleterre. C’est là que commence sa lente chute.
Göring surestime les capacités de son aviation et minimise celles de la RAF. Il ne comprends pas non plus la puissance du système radar anglais, et promet à Hitler une victoire rapide. Mais la Luftwaffe est repoussée et les bombardements échouent à briser la résistance britannique. Dès lors, Göring commence à perdre la confiance du Führer.
Il multiplie ensuite les erreurs :
- Il promet à Hitler que la Luftwaffe va ravitailler la VIe armée à Stalingrad par voie aérienne, alors que la mission était irréalisable
- Il promet des performances que la Luftwaffe ne peut plus tenir
- Il se replie dans une posture de courtisan
À partir de 1943, son rôle militaire devient purement honorifique. Il reste maréchal du Reich, mais Hitler se détourne de lui. Leur relation, autrefois fusionnelle, se refroidit.
Déchéance, disgrâce et chute
Göring ne supporte pas cette mise à l’écart. En avril 1945, alors que Hitler est reclus dans son bunker à Berlin, Göring tente un coup politique en envoyant un télégramme dans lequel il propose de prendre la direction de l’État, conformément à un décret antérieur. Hitler y voit une trahison. Il le révoque de toutes ses fonctions, le fait arrêter par la SS, et ordonne même, un temps, son exécution. Elle ne sera toutefois pas appliquée.
Capturé par les Américains en mai 1945, Göring se livre sans résistance, vêtu de ses uniformes, persuadé qu’il peut négocier. Mais il déchante rapidement en se rendant compte qu’il n’aura pas le moindre traitement de faveur. Lors du procès de Nuremberg, désormais sevré, il redevient la figure centrale du nazisme déchu. Brillant orateur, stratège judiciaire redoutable, il tente de justifier l’ensemble de ses actes et de protéger l’image du régime.

United States Holocaust Memorial Museum
Il est reconnu coupable de complot, crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité et est condamné à mort. La veille de son exécution, dans sa cellule, il se suicide en avalant une capsule de cyanure, probablement cachée ou transmise par complicité. Il meurt dans la nuit du 15 au 16 octobre 1946, échappant ainsi à la pendaison.