LES DOSSIERS
Les derniers jours de Hitler
À la mi-avril 1945 la situation militaire allemande est catastrophique : l’Armée rouge a lancé la bataille de Berlin et encercle la capitale. Depuis le début mois, Hitler à installé son bureau dans son Führerbunker sous la chancellerie ; une partie de l’appareil d’État est encore présente (Bormann, Goebbels), mais les communications et l’autorité centrale se délitent de plus en plus. Les jours qui suivent sont une succession d’espoirs illusoires, d’ordres irréalistes, de trahisons et d’effondrement moral.
« L’anniversaire », ou le dernier contact avec le monde extérieur
Le 20 avril 1945, Adolf Hitler touche le crépuscule de son règne. La guerre est perdue, et Berlin croule sous les obus soviétiques. Ce jour-là est pourtant marqué par un simulacre d’anniversaire. En effet, dans la nuit, des membres de son entourage — Wilhelm Burgdorf, Hermann Fegelein, Otto Günsche, Walter Hewel, Julius Schaub, Heinz Lorenz — se pressent à l’entrée de son bureau. Il apparaît fatigué, et salue les présents d’un geste mécanique.
Les dernières images du Führer
Plus tard dans la journée, il remonte en surface pour une cérémonie lunaire. Dans les ruines du jardin de la Chancellerie, il remet la Croix de fer à environ 20 adolescents de la Hitlerjugend, âgés de 12 à 15 ans, chargés de la défense de Berlin. Une caméra est présente et filme le tout pour la propagande. Ce seront les toutes dernières images d’Hitler. Sur certains des plans, il apparaît avec son bras tremblant dans son dos (il souffre en effet de la maladie de Parkinson) alors qu’il serre la main d’un jeune garçon avec les ruines et les sifflements d’obus en toile de fond.
Ensuite, il repart dans son bunker et y tient une réunion en présence de hauts dignitaires nazis : Göring, Joachim von Ribbentrop (ministre des Affaires étrangères), Karl Dönitz (chef de la Kriegsmarine), Albert Speer (ministre des Armements et de la Production de guerre), Wilhelm Keitel, (chef du haut commandement militaire allemand), ou encore Hans Krebs (chef d’état-major général de l’armée de terre).
Les adieux
Tout d’abord, Hitler leur annonce « qu’il resterait à Berlin jusqu’à la dernière minute, et, à ce moment seulement, s’envolerait vers le sud »1. Ensuite, il fait ses adieux – chaleureux – à Dönitz qui part organiser la résistance dans le nord du pays. En revanche, d’après les témoignages, Hitler est glacial avec Göring. Himmler, Ribbentrop et d’autres quittent les lieux en invoquant des prétextes divers, ce qui aurait selon l’aide de camp d’Hitler provoqué sa déception.
Totalement déconnecté des réalités, Hitler ordonne ensuite au chef d’état-major général Krebs de faire lancer une contre-offensive à l’ouest de Berlin, menée par les 3e et 4e armées blindées, dépourvues pourtant de tout moyen offensif digne de ce nom.

Hitler, lors de sa dernière apparition publique
La folie des « offensives » chimériques
Berlin fait l’objet d’intenses tirs d’artillerie lourde soviétique. Lors d’une conversation téléphonique, le général Karl Koller informe Hitler que la batterie soviétique est à 12km de Berlin. Cette information ébranle Hitler qui ne pensait pas les soviétiques aussi proches.
Dans la nuit du 21 au 22 avril, il ordonne à Felix Steiner (commandant d’unités SS) une contre-attaque pour dégager Berlin. Il précise qu’il répond de l’exécution de cet ordre sur sa tête.
L’offensive Steiner
Le 22 avril, Hitler apprend le refus de Steiner d’exécuter l’ordre parce qu’il n’a pas de troupes mobiles suffisantes. Dès lors, il entre alors dans une crise de colère au cours de laquelle il déclare que la guerre est perdue, blâme et insulte les généraux. Selon Keitel et Jodl, avec lesquels le Führer s’est isolé, Hitler leur déclare : « J’abandonne, et c’est définitif. […] S’il faut vraiment négocier avec l’ennemi, ce qui est le cas à présent, alors Göring est le plus qualifié. Je livrerai le combat pour Berlin, et je le gagnerai, ou alors je serai tué dans Berlin »2.
Plus tard dans la journée il apparaît revigoré, et se remet à ordonner une nouvelle contre-offensive chimérique : cette fois-ci ce sont aux 12ème et 9ème armées sous le commandement de Keitel de sauver la situation.
« J’aurais nettement préféré que vous ordonniez de me fusiller »
Le même jour une rumeur se répand dans le bunker : le général Helmuth Weidling aurait transféré son PC du sud-est à l’Ouest de Berlin. Hitler ordonne de le relever de ses fonctions, de le traduire devant un tribunal militaire et de l’exécuter. Cependant, Weidling ne se laisse pas intimider et rejoint alors le bunker. Il y rencontre Krebs et Burgdorf et leur demande pour quelle raison il doit être fusillé. Alors qu’il apporte la preuve que son PC est toujours au sud-est, à 1 ou 2 km des soviétiques, ses interlocuteurs deviennent nettement plus aimables. Ils l’amènent devant Hitler.
Weidling racontera par la suite l’entretien : Hitler avait le « visage boursouflé » et un regard « étrangement brillant, comme s’il avait de la fièvre ». Surtout, le général assista avec une « stupéfaction croissante » a l’exposé du Führer sur la défense de Berlin. Hitler pensait les soviétiques durement éprouvés, voire même exterminés grâce à Steiner. Weidling quitta le bunker. Le lendemain, Krebs l’informa qu’Hitler l’avait nommé « commandant du périmètre de défense de Berlin ». Réponse sèche du général : « J’aurais nettement préféré que vous ordonniez de me fusiller. Ce calice s’éloignerait de mes lèvres ».
L’arrivée de la famille Goebbels
Magda Goebbels rejoint le bunker avec ses six enfants (Helga, Hilde, Helmut, Holdine, Hedwig, Heidrun). Elle déclare qu’ils mourront ensemble plutôt que voir leur monde disparaître. Les enfants jouent, chantent pour Hitler. Averti de la décision des époux Goebbels de tuer leurs enfants avant de se suicider, Hitler offre à Magda son insigne d’or du Parti nazi. Elle dit alors qu’il s’agit du « plus grand honneur qu’une Allemande peut recevoir ». Il lui a été attribué car elle était, selon Hitler, « la plus grande mère du Reich ».

Joseph et Magda Goebbels, accompagnés de leurs enfants. L’ainé, Harald Quandt, ici en uniforme militaire, est issu du premier mariage de Magda.
La rupture avec Göring
À l’aube, Berlin est désormais encerclée sur trois côtés par l’Armée rouge. Dans le bunker, l’atmosphère est lourde, saturée de fumée de cigarettes.
La dernière entrevue avec Speer
Albert Speer, ministre de l’Armement, parvient à rejoindre Berlin depuis Hambourg au prix d’un dangereux voyage. Il descend au bunker pour ce qui sera sa dernière conversation avec Hitler. Speer avoue qu’il a sciemment désobéi à son ordre de pratiquer la politique de la terre brûlée (le fameux Néronbefehl), refusant de détruire les infrastructures allemandes. Hitler écoute, impassible, et finit par lâcher cette phrase : « Si la guerre est perdue, la nation a montré qu’elle n’était pas digne de survivre ».
Contre toute attente, il ne le fait pas exécuter, comme il l’avait pourtant promis pour toute désobéissance. Au contraire, il le laisse repartir, en lui serrant la main : un geste qui surprendra Speer toute sa vie. Après un dernier échange avec Eva Braun, Speer quitte le bunker pour aller visiter une dernière fois la Chancellerie qu’il avait construite pour Hitler.
La chute de Göring
Dans la soirée, un télégramme arrive du quartier général de Göring, réfugié en Bavière. Il rappelle à Hitler le décret de 1941 le désignant comme son successeur et demande donc s’il doit assumer les pouvoirs du Reich, estimant que le Führer est dans l’impossibilité de gouverner. Martin Bormann, qui contrôle l’accès à Hitler dans le bunker, présente la chose comme une manœuvre de coup d’État. Hitler, effondré puis furieux, considère cela comme une trahison ; la rupture entre lui et Göring devient officielle. Il dicte sur-le-champ un ordre d’arrestation de Göring, et fait retirer toutes ses charges.
Péripéties aériennes
Le 25 avril, lors d’une conférence de situation, Hitler passe de la folie des grandeurs au délire obsessionnel, et affirme que des divergences entre les Alliés vont apparaître, ce qui constituerait un tournant s’il défait l’Armée rouge à Berlin : « Alors les autres finiront peut-être par être convaincus qu’une seule entité possède la capacité de contenir le colosse bolchevique : moi, et le parti, et l’État allemand actuel »3.
Ritter von Greim remplace Göring
Par la suite, le 26 avril, le général Robert Ritter von Greim et Hanna Reitsch, pilote d’essai réputée (et également sa maîtresse), effectuent un vol très risqué pour atteindre Berlin sur ordre d’Hitler. Ils parviennent à atterrir dans la ville assiégée.
Von Greim, blessé à la jambe par un tir de DCA, est présenté à Hitler et nommé dans la foulée commandant en chef de la Luftwaffe en remplacement de Göring. Il charge le duo d’une mission, là encore, chimérique : repartir de Berlin pour organiser depuis l’extérieur des frappes aériennes. Von Greim quittera Berlin le 28 avril, toujours accompagné de sa maîtresse, et réussira à s’envoler du Tiergarten à la surprise des Russes tout proches.
Hitler reçoit le général Helmuth Weidling, commandant désigné de la défense de Berlin. Weidling, homme pragmatique, lui expose la situation : les munitions s’épuisent, il ne reste que quelques jours avant la chute.
D’abord furieux, Hitler l’accuse de pessimisme. Mais Weidling insiste sur la nécessité de négocier pour éviter un bain de sang inutile. Hitler refuse catégoriquement. Il ordonne que Berlin soit défendue « jusqu’au dernier homme ». Il évoque encore des armées fantômes censées venir à la rescousse, notamment celle de Wenck. Là encore, cela relève de l’illusion.
La trahison d’Himmler
Le 28 avril la BBC annonce que Heinrich Himmler a tenté de négocier une reddition avec les Alliés (via, notamment, le comte Folke Bernadotte). Apprendre que Himmler cherche à traiter avec l’ennemi équivaut pour Hitler à la plus grave des trahisons. Bormann, Goebbels et d’autres présentent cela comme une infidélité politique inexcusable. Hitler, selon Hanna Reitsch, « se démenait comme un fou, son visage empourpré était presque méconnaissable ». Dès lors, il donne l’ordre d’arrestation de Himmler et le fait démettre de ses fonctions.
L’exécution de Fegelein
Le même 28 avril, Hermann Fegelein (représentant de Himmler auprès du Führer, et beau-frère d’Eva Braun) est recherché sur ordre d’Hitler. En définitive, il est trouvé et arrêté près du Reichschancellery. Il avait en effet tenté de fuir, a été trouvé vêtu en civil et a été saisi par les services du bunker.
Tandis que les comptes rendus divergent sur les détails (ivresse, tentative d’évasion), les versions convergent sur un point : Fegelein est jugé sommairement pour désertion et trahison, puis exécuté. Selon plusieurs récits, il est jugé et exécuté dans la nuit du 28 au 29 ou tôt le 29. D’autres sources laissent une part d’incertitude sur l’heure exacte et le lieu.

Plan du bunker d’Hitler
- Fosse d’incinération
- Sortie vers le jardin
- Ventilation et tour de garde
- Ventilation et tour de garde (en construction)
- Prise d’air
- Générateur et évacuation d’air conditionné
- Mur du jardin de l’ancienne chancellerie
- Plafond en béton armé de 3,43 m d’épaisseur
- Escalier menant à la tour de garde
- Vestiaire
- Salle de conférence/salle des cartes
- Chambre à coucher d’Hitler
- Bureau d’Hitler
- Salon d’Hitler
- Chambre à coucher d’Eva Braun
- Dressing/salle de bain
- Toilettes
- Salle des machines électriques
- Couloir/salon
- Salle de conférence
- Chambre à coucher de Goebbels
- Quartiers du médecin
- Bureau de Goebbels et cabinet médical
- Central téléphonique et bureau de Bormann
- Générateur/système de ventilation
- Portes anti-gaz
- Hall/salon
- Escaliers menant à l’avant-bunker
- Dépôt
- Appartements de la famille Goebbels
- Cantine
- Escaliers vers le ministère des Affaires étrangères
- Salle de conférence/couloir
- Cellier et cave à vin
- Cuisine
- Réservoirs d’eau
- Chaufferie
- Escaliers vers l’ancienne chancellerie du Reich
- Tunnel vers la nouvelle chancellerie du Reich
- Fosse d’incinération
- Sortie vers le jardin
- Ventilation et tour de garde
- Ventilation et tour de garde (en construction)
- Prise d’air
- Générateur et évacuation d’air conditionné
- Mur du jardin de l’ancienne chancellerie
- Plafond en béton armé de 3,43 m d’épaisseur
- Escalier menant à la tour de garde
- Vestiaire
- Salle de conférence/salle des cartes
- Chambre à coucher d’Hitler
- Bureau d’Hitler
- Salon d’Hitler
- Chambre à coucher d’Eva Braun
- Dressing/salle de bain
- Toilettes
- Salle des machines électriques
- Couloir/salon
- Salle de conférence
- Chambre à coucher de Goebbels
- Quartiers du médecin
- Bureau de Goebbels et cabinet médical
- Central téléphonique et bureau de Bormann
- Générateur/système de ventilation
- Portes anti-gaz
- Hall/salon
- Escaliers menant à l’avant-bunker
- Dépôt
- Appartements de la famille Goebbels
- Cantine
- Escaliers vers le ministère des Affaires étrangères
- Salle de conférence/couloir
- Cellier et cave à vin
- Cuisine
- Réservoirs d’eau
- Chaufferie
- Escaliers vers l’ancienne chancellerie du Reich
- Tunnel vers la nouvelle chancellerie du Reich
Les dernières heures
Le mariage du Führer
Le 29 avril est une journée cruciale et dense en événements symboliques. Pour commencer, peu après minuit (dans la nuit du 28 au 29) Adolf Hitler épouse Eva Braun. La cérémonie civile – courte – se déroule dans le bunker. Les témoins sont Joseph Goebbels et Martin Bormann.
La « noce » est modeste et est suivie d’un petit déjeuner nuptial auquel participent le couple Goebbels, Gerda Christian et Traudl Junge (secrétaires d’Hitler). Hitler s’isole peu après avec cette dernière et lui dicte ses testaments politique et personnel. Il nomme Karl Dönitz comme président du Reich et Joseph Goebbels comme chancelier. Il écarte Göring et Himmler pour cause de « trahison ».
« Moi et ma femme choisissons la mort pour échapper à la honte de la déposition ou de la capitulation. Notre désir est d’être brûlés immédiatement sur les lieux où j’ai fourni la plus grande partie de mon travail quotidien pendant les douze années passées au service de mon peuple »
La mort de Mussolini
Dans la matinée, Hitler apprend la mort de Mussolini, exécuté par les partisans italiens, et dont la dépouille a été exposée et profanée par la foule. Cette information le conforte dans sa volonté de se suicider et que son corps soit brûlé afin de ne pouvoir être exhibé par les Russes.
Le test des capsules de cyanure
De plus en plus méfiant, Hitler fait tester les capsules de cyanure remises par Himmler. A cet effet, le médecin SS Werner Haase (ou un autre médecin du bunker selon les versions) administre une capsule de cyanure à Blondi, le chien d’Hitler. L’animal meurt instantanément. Ce test vise à s’assurer que la méthode envisagée pour les suicides d’Eva Hitler et de lui-même fonctionnera. Plusieurs témoins rapportent l’état de stupeur d’Hitler devant la dépouille.
Le 30 avril 1945, contrairement à ses habitudes, Hitler se lève tôt. Vers six heures du matin il convoque une réunion. Au cours de celle-ci, il reçoit de multiples informations qui laissent présager de la défaite imminente du Reich. Keitel confirme qu’aucune force ne peut venir au secours de Berlin. Wilhelm Mohnke estime que les forces défendant la chancellerie ne peuvent plus résister qu’au maximum pendant deux jours. Helmuth Weidling déclare que, faute de munitions, les combats doivent cesser la nuit suivante et sollicite à nouveau l’autorisation de tenter une percée. Hitler refuse.
Instructions et dernier repas
En fin de matinée, il donne à son aide de camp, Otto Günsche, des instructions précises pour l’incinération de son corps et de celui d’Eva Hitler. A cet effet, il lui ordonne de procéder à cette opération avec les bidons d’essence rassemblés la veille et sur son ordre par son chauffeur, Erich Kempka. Ensuite, Hitler déjeune avec ses deux secrétaires, ainsi que sa diététicienne, Constanze Manziarly.
Après le repas, Hitler rejoint sa femme dans sa chambre, puis le couple fait ses adieux aux proches rassemblés par Günsche. Sont présents les secrétaires de Hitler, les généraux Krebs et Burgdorf, Bormann et Goebbels. A noter, l’absence de Magda Goebbels, qui est sous le choc de la mort à venir du Führer.
La secrétaire d’Hitler racontera dans ses mémoires : « Il sort très lentement de sa chambre, plus courbé que jamais […] et tend la main à chacun. Je sens sa main droite chaude dans la mienne, il me regarde mais il ne voit pas. Il semble être très loin »4.
Le suicide
Vers 14H30, Adolf et Eva Hitler se retirent dans leurs quartiers. Le niveau inférieur du bunker est évacué. Vers 15 h 15, Heinz Linge (valet de chambre du Führer), accompagné de Günsche, Goebbels et Bormann, pénètre dans le salon de Hitler et y découvrent les deux cadavres.
Selon les témoignages et les analyses historiques recoupés par l’historien allemand Joachim Fest, Hitler est assis sur le canapé, tassé sur lui-même, la tête légèrement penchée en avant et les yeux ouverts. Sur sa tempe droite, il y a un trou qui laisse échapper un filet de sang ; et le mur derrière lui est taché de sang. Eva Hitler gît à ses côtés sur le canapé, les jambes repliées sous elle, les lèvres serrées et bleuâtres, exhalant une odeur d’amande amère.
Les sources historiques ne sont pas unanimes sur le sujet. D’un côté, selon les témoignages les plus fiables (notamment ceux de Heinz Linge et de Otto Günsche), Hitler se serait tiré une balle dans la tête avec son pistolet tout en mordant une capsule de cyanure. Toutefois, d’autres récits suggèrent qu’il aurait seulement utilisé l’arme à feu.
La crémation du corps
Conformément aux dernières instructions d’Hitler, les corps sont transportés à la sortie du bunker, posés dans un cratère ou une zone dégagée du jardin de la Chancellerie, arrosés d’essence et partiellement brûlés par un groupe restreint (Günsche, Linge, quelques aides). Selon plusieurs témoignages, les dignitaires présents (Bormann, Goebbels, Burgdorf, ou encore Krebs) se tinrent au garde-à-vous, certains faisant le salut hitlérien.
La combustion est incomplète et les Soviétiques diront plus tard avoir récupéré des fragments dentaires et des restes calcinés. La confirmation médico-légale ultérieure reposera surtout sur l’identification dentaire.
Après le suicide…
Le 1er mai 1945, peu avant quatre heures du matin, au cours des négociations pour la reddition des forces défendant Berlin, le général Krebs informe le général russe Vassili Tchouïkov, commandant des forces de l’Armée rouge engagées dans la bataille de Berlin, du suicide du Führer. La population allemande est avertie de la mort de Hitler par un communiqué diffusé à 22 h 26. Le communiqué est un nouvel exemple de la propagande du régime : il date la mort du jour même, et non de la veille, et affirme qu’Hitler est mort au combat…
Dans l’après-midi, Joseph et Magda Goebbels font assassiner leurs six enfants par le docteur Ludwig Stumpfegger, puis se suicident et se font incinérer dans les jardins de la chancellerie. Au cours de la nuit, les généraux Krebs et Burgdorf, complètement ivres, se suicident également en se tirant une balle dans la tête. Les autres occupants du bunker prennent la fuite par groupes plus ou moins importants et connaissent des sorts divers.
Le sort des corps, et du bunker
L’avancée rapide de l’armée soviétique fit que les restes d’Hitler restes furent rapidement recueillis, soumis à des autopsies, puis enterrés clandestinement dans un terrain contrôlé par les services soviétiques à Magdebourg5.
Durant des décennies, les corps (ainsi que ceux de la famille Goebbels, de la chienne Blondi et d’autres) restèrent en place jusqu’en 1970. Craignant qu’un lieu de mémoire ne devienne un sanctuaire néonazi, les autorités soviétiques ordonnèrent de les exhumer et de les brûler une seconde fois — au point de ne conserver que des fragments de mâchoire. Ensuite, les cendres furent dispersées dans une rivière, probablement la Biederitz.
Aujourd’hui, seul un fragment de mâchoire (et des restes osseux douteux) sont conservés dans les archives d’État russes.
Le sort du bunker
Du côté du bunker, les Soviétiques rasèrent la Chancellerie (l’ancienne comme la nouvelle) mais laissèrent le bunker en grande partie intact. En effet, en 1947, les essais d’explosion ne parvinrent qu’à endommager certains murs intérieurs et les sorties de secours, sans détruire le cœur du complexe.
En 1959, la RDA entreprit une nouvelle opération de démolition. Puis, avec la construction du Mur de Berlin, le site fut délaissé et laissé à l’abandon… Jusqu’à la fin des années 1980, où des ouvriers redécouvrirent des parties souterraines (notamment un ancien garage de la chancellerie), qui furent rapidement comblées ou détruites6.
Désormais, un panneau d’information, installé en 2006, signale discrètement l’emplacement du Führerbunker, à l’angle de Gertrud-Kolmar-Straße et In den Ministergärten, à proximité de Potsdamer Platz.

Heinrich Himmler
Capturé par les Britanniques le 23 mai 1945, il se suicide par ingestion de cyanure avant tout interrogatoire.

Hermann Göring
Condamné à mort à Nuremberg mais se suicide au cyanure la veille de son exécution en 1946.

Albert Speer
Jugé à Nuremberg, condamné à 20 ans de prison, il est libéré en 1966, il devient écrivain et meurt en 1981.

Martin Bormann
Disparu dans la nuit du 1er au 2 mai 1945 en tentant de fuir Berlin ; son corps n’est identifié que dans les années 1970 grâce à l’ADN.

Felix Steiner
Fait prisonnier par les Britanniques, libéré en 1948, meurt en Allemagne en 1966.

Wilhelm Keitel
Condamné à mort à Nuremberg et pendu le 16 octobre 1946.

Alfred Jodl
Condamné à mort à Nuremberg et pendu le 16 octobre 1946, inhumé anonymement.

Helmuth Weidling
Commandant de la défense de Berlin, capturé par les Soviétiques, meurt en détention à Moscou en 1955.

Ritter von Greim
Arrêté par les Américains, il se suicide le 24 mai 1945 par ingestion de cyanure.

Hanna Reitsch
Pilote d’essai, capturée par les Américains, libérée, poursuit sa carrière aéronautique et meurt en 1979.

Wilhelm Mohnke
Général SS, capturé par les Soviétiques, détenu jusqu’en 1955, vit ensuite en Allemagne de l’Ouest jusqu’à sa mort en 2001.

Gerda Christian
Secrétaire d’Hitler, capturée par les Soviétiques, libérée en 1946, mène ensuite une vie discrète jusqu’à sa mort en 1997.

Traudl Junge
Secrétaire personnelle d’Hitler, capturée par les Soviétiques puis par les Américains, libérée, meurt en 2002.

Otto Günsche
Aide de camp d’Hitler, capturé par les Soviétiques, détenu jusqu’en 1956, mène ensuite une vie discrète en RFA.

Constanze Manziarly
Diététicienne d’Hitler, disparaît en mai 1945 en tentant de fuir Berlin, probablement tuée par des soldats soviétiques.

Heinz Linge
Valet de chambre d’Hitler, capturé par les Soviétiques, libéré en 1955, publie ses mémoires et meurt en 1980.
1 Antony Beevor, La chute de Berlin
2 François Kersaudy, Hermann Goering
3 Joachim Fest, Les derniers jours de Hitler
4 Traudl Junge, Dans la tanière du loup
5 Whatever Happened to Hitler’s Body ?
6 Führerbunker – Wikipedia