Joachim von Ribbentrop
(1893-1946)
Joachim von Ribbentrop, né en 1893 à Wesel dans une famille de petite noblesse prussienne, grandit dans un environnement imprégné de discipline militaire et d’ambition sociale. Rien dans sa jeunesse ne semble annoncer l’homme qui deviendrait l’un des architectes diplomatiques du nazisme, sinon une profonde volonté d’ascension et un goût certain pour l’apparat. Après quelques années passées à voyager comme employé de commerce, il sert comme officier durant la Première Guerre mondiale. Par la suite, il se lance dans les affaires, épousant la fille d’un riche négociant en vin. De fait, son mariage va contribuer largement à son enrichissement et à son entrée dans la haute société berlinoise.
Entrée dans le nazisme et ascension auprès d’Hitler
C’est au cours des années 1920 qu’il rejoint le NSDAP, convaincu que le mouvement d’Hitler représente l’avenir de l’Allemagne. Son opportunisme, plus encore que ses convictions, attire l’attention du Führer. Ribbentrop lui fournit des contacts, des salons, et un vernis de respectabilité mondaine. Hitler l’apprécie pour sa loyauté absolue et sa capacité à dire exactement ce que le Führer souhaite entendre. À l’inverse, la plupart des dirigeants nazis — Göring en tête — le méprisent profondément. On le juge arrogant, vaniteux, et surtout dépourvu de véritable compétence. Göring l’appelle « le bouteiller », en référence à son passé dans le commerce de vin. D’autres préféreront des surnoms encore plus acides. Ribbentrop, persuadé de son génie diplomatique, leur rend leur mépris avec zèle.
Ribbentrop ambassadeur en Grande-Bretagne : un désastre…
En 1936, Hitler l’envoie comme ambassadeur à Londres. Cette nomination est destinée moins à soigner les relations avec le Royaume-Uni qu’à donner à son protégé un rôle prestigieux. Ce séjour tourne rapidement au désastre. Ribbentrop ne comprend ni l’esprit britannique, ni les subtilités de la diplomatie anglaise, ni même l’importance des usages. Il accumule les impairs : salut nazi à Buckingham Palace, discours maladroits, absence de tact, menaces mal dissimulées, attitude condescendante envers le Foreign Office.
Ses prétentions aristocratiques et son comportement raide lui valent les moqueries de la presse britannique, qui le surnomme « Ambassador Brickendrop » : une allusion à l’anglais to drop a brick, “laisser tomber une brique”, c’est-à-dire commettre une gaffe embarrassante. Aux yeux de Londres, il apparaît comme un fanatique obtus, incapable de subtilité, totalement aveuglé par sa dévotion au Führer. De plus, ses recommandations sont systématiquement erronées. En effet, il affirme qu’une alliance anglo-allemande est à portée de main, ce qui n’est pas le cas. Le gouvernement britannique le considère même comme l’un des diplomates les plus incompétents qu’il lui ait été donné de recevoir.
Ministre des Affaires étrangères du Reich
Ce fiasco n’entame pourtant en rien la confiance d’Hitler. Ainsi, en 1938, Ribbentrop est nommé ministre des Affaires étrangères. A ce poste, il ne cessera de multiplier les erreurs d’appréciation, tout en affichant une assurance imperturbable. Obnubilé par l’idée d’aligner la politique extérieure de l’Allemagne sur l’idéologie du régime, il se fait l’un des promoteurs les plus ardents d’une guerre préventive contre les puissances occidentales. Son rôle est crucial dans la négociation du pacte germano-soviétique d’août 1939. Il s’agit d’un succès diplomatique indéniable, mais dont les conséquences stratégiques se révéleront brutales quelques années plus tard.

Relations conflictuelles et caractère décrié
Au sein de la direction nazie, ses relations sont empoisonnées par son caractère. Ribbentrop est décrit comme étant colérique, excessif, perçu comme mentalement instable, accuse ses collègues d’incompétence… Il se heurte violemment à Göring, qui le méprise profondément. Himmler, Goebbels, Bormann le tiennent pour un incapable dont l’obsession pour les apparences masque mal la faiblesse intellectuelle. Mais il conserve l’appui du seul homme qui compte réellement : Hitler. Le Führer voit en effet en lui un exécutant fidèle et entièrement soumis.
Rôle durant la guerre et participation à la politique criminelle
Durant la guerre, Ribbentrop se montre farouchement hostile à toute négociation. Même lorsque la situation devient désespérée, il continue d’assurer au Führer que les Alliés finiront par se diviser. Fanatiquement attaché à la victoire finale, il refuse toute idée de compromis et participe activement à la politique d’extermination, notamment en soutenant l’extension de la solution finale dans les territoires occupés. Son ministère, bien que marginalisé par la SS, contribue à organiser les déportations et les spoliations des populations d’Europe de l’Est.
Défaite, procès et exécution

Arrêté en 1945, il comparaît à Nuremberg, où son attitude suscite la stupeur. Toujours sûr de lui, toujours convaincu de son importance, il tente de se présenter comme un diplomate soucieux de paix, victime d’un Führer dominateur. Ses mensonges, son arrogance, ses contorsions intellectuelles éveillent même chez certains juges un mélange de consternation et de pitié. Condamné à mort pour crimes contre la paix, crimes de guerre et crimes contre l’humanité, il est pendu en octobre 1946. Jusqu’au bout, il refuse de reconnaître la moindre responsabilité, fidèle à son aveuglement et à sa vanité qui, pendant toute sa carrière, avaient masqué le vide abyssal de son talent.
Sources :
https://www.crrl.fr/module-Contenus-viewpub-tid-2-pid-154.html
https://encyclopedia.ushmm.org/content/fr/article/german-foreign-policy-1933-1945
https://www.appeasement.info/ribbentrops-nazi-salute-at-buckingham-palace/